Faisant suite à la dernière conférence des gouverneurs tenue du 23 au 25 juillet 2013 au palais des congrès de Yaoundé et présidée par le Ministre de l'administration Territoriale et de la décentralisation (MINATD), les gouverneurs avaient reçus l'ordre de fermer les associations religieuses "illégales".
Selon toute vraisemblance, l'ordre serait intimé par le Chef de l'Etat, son Excellence Paul BIYA qui aurait ordonné la fermeture de près d'une centaine d'églises chrétiennes, la raison principale étant l'illégalité dans laquelle elles fonctionnent, à cette raison principale, on peut ajouter les "pratiques criminelles" organisées par les pasteurs pentecotistes et menançant la sécurité de la nation.
A cet effet, un fonctionnaire du gouvernement a déclaré à CNN «Nous allons vous débarrasser de tous les soi-disant pasteurs pentecôtistes qui abusent du nom de Jésus-Christ pour de faux miracles et tuent des citoyens dans leurs églises. Ils ont étendu leur liberté».
Il existerait au Cameroun, plus de 500 églises, toutes confessions religieuses comprises contre 47 dûment autorisées.
Sur le terrain, un bon nombre d'églises s'est vu apposé les scellés, traduisant tout simplement, leur état de fonctionnement précaire du point de vue de la loi.
A Yaoundé par exemple, "La Cathédrale de la Foi" du prophète Dieunedort KAMDEM, a été fermée, du côté de Douala, l'église "Liberty Church International" a connu le même sort pour ne citer que celles là.
De fin juillet à ce jour, certaines sources indiquent plus d'une soixantaine d'églises fermées dans l'ensemble des dix régions que comptent le Cameroun et l'action se poursuit.
L'enquête qu'a menée Camfaith porte sur les axes suivants :
- De quoi sont reprochées ces églises ?
- Quelles sont les dispositions du point de vue légal pour ouvrir une association religieuse au Cameroun ?
- Quelle est la liste des confessions religieuses autorisées au Cameroun ?
- D'un point de vue biblique comment apprécions nous ces répressions ?
1. Reproches aux églises de réveil au Cameroun
Plus d'un citoyen camerounais interrogé sur la question cite les points ci bas :
- Prolifération des églises (les noms divergents, les maisons transformées, les salles de bar, cinéma etc...) ;
- Impostures de certains "pasteurs, prophètes..." (escroquerie, ingérence dans les affaires des chrétiens, pressions financière sur les membres, vente des "eaux bénites", "huiles d'onction", ...) ;
- Nuisances sonores et nocturnes (nuits de prières sur haut parleur, nuit de louanges pertubant tout le voisinnage etc...) ;
- Ingérence et troubles dans les foyers (détournement des mariages, divisions entre les couples...) ;
- Détournement des mineurs (pertubations de la vie scolaire des enfants par des activités religieuses, rebellions des enfants au sein de leurs familles,...) ;
- Faux miracles (fausses guérisons, fausses délivrances orchestrées pour vendre l'illusion, attirer des adeptes et se faire de l'argent...) ;
- Appauvrissement des citoyens (offrandes pour les prières, ventes des services religieux, soutiens financiers à l'église...)...
Sans compter les "serviteurs de Dieu" accusés d'immoralité...
Ces reproches sont listés ici à la foulée sans pour autant refleter le point de vue de Camfaith.
2. Dispositions prévues par la loi du Cameroun pour une association religieuse
Le Cameroun reconnait et respecte le droit sur la liberté d'association et la liberté du culte, a reconnu le MINATD.
Selon la loi camerounaise, seul le président de la République est habilité à signer le décret qui consacre l’autorisation de création et d’ouverture d’une association religieuse. Le décret du chef de l’Etat fait suite à un dossier instruit par le Minatd et contenant des résultats d’une enquête de moralité sur le promoteur et divers autres éléments. Le dossier est constitué ainsi que suit :
- Une demande timbrée adressée au Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation ;
- Trois exemplaires des statuts de l'association ;
- Trois exemplaires du règlement intérieur ;
- Trois exemplaires du procès-verbal de l'Assemblée constitutive ;
- Trois exemplaires de la liste des membres du bureau Directeur ou exécutif en engagement signé et légalisé de respecter les dispositions de l'article 4 de la loi n°90/053 du 19 décembre portant sur la liberté d'association.
Le Ministère de l'administration territoriale et de la Décentralisation précise que l'élaboration des statuts doit s'inspirer profondément de la loi sur la liberté d'association.
Le dossier ainsi constitué, est déposé à la préfecture du lieu où l'association a son siège. Puis le Préfet fait acheminer le dossier par voie hiérarchique à son destinataire (Minatd). Ensuite, le Préfet procède aux enquêtes de moralité d’âge sur les membres du bureau directeur.
Les résultats des enquêtes sont ainsi transmis au Ministre de l'administration territoriale et de la décentralisation qui instruit le dossier de son avis favorable et l'introduit au cabinet de la présidence de la république.
Le Président de la république seul, donne autorisation par decret et c'est dès lors que l'association religieuse peut fonctionner.
3. Liste des confessions religieuses autorisées au Cameroun à ce jour
N° D’ORDRE - DENOMINATION - SIEGE - ACTE D’AUTORISATION
- Société Missionnaire Baptiste Européenne (Suisse) - Zurich - Décision n°5851 du 16 Novembre 1952
- Assemblée Chrétienne Témoins du Christ - Douala - Lettre n°1319/INT/2 du 29 juin 1960
- Mission Catholique Romaine - Yaoundé - Décision n°16/ATF/APA/2 du 20 Février 1962
- Presbyterian Church in Cameroon (P.C.C.) - Buéa - Lettre n° 1 du 14 Avril 1 962
- Eglise Presbytérienne Camerounaise (E.P.C.) - Yaoundé - Décision n°55/ATF/2 du 14 juillet 1963
- Eglise Protestante Africaine du Cameroun (E.P.A.) - Lolodorf - Décision n°26/ATF/AT/2 du 25 Février IÎ964
- Eglise Evangélique Luthérienne du Cameroun - Ngaoundéré - Décision n°63/ATF/AG2/2 du 3 juillet 1967
- Eglise Apostolique du Cameroun - Kumba - Décret n°68/DF/246/2 du 10 juillet 1968
- Eglise Fraternelle Luthérienne du Nord Cameroun - Kaéle - Décret n°69/DF/154 du 26 Avril 1969
- Full Gospel Mission ou Mission du Plein Evangile - Muyuka - Décret n°69/DF/246 du 26 Avril 1969
- Eglise Frontières Globales - Kumba - Décret n°69/DF/4 18 du 20 Octobre 1969
- Assemblée Spirituelle Nationale des Béhaistes - Limbe - Décret n°68/DF/436 du 8 Novembre 1969
- Union des Eglises Evangéliques au Nord Cameroun - Mokolo - Décret n°70/DF/-5 du 13 Janvier 1970
- Eglise Presbytérienne Camerounaise Orthodoxe (E.P.C.O.) - Yaoundé - Décret n°70/DF/88 du 18 Février 1970
- Union des Eglises Baptistes du Cameroun (U.E..B.C.) - Douala - Décret n°71/DF/518 du 20 Octobre 1971
- World Wide Mission - Muyuka - Décret n°71/DF/608 du 3 Décembre 1971
- Eglise du Christ - Kumba - Décret n°71/DF/619 du 14 Décembre 1971
- La Vraie Eglise de Dieu du Cameroun - Yaoundé - Décret n°71/DF/639 du 31 Décembre 1971
- Eglise Baptiste Camerounaise (E.B.C.) - Douala - Décret n°72/DF/87 du 16 Février 1972
- Congrégation Baptiste Camerounaise - Douala - Décret n°74/34 du 19 Janvier 1974
- Eglise Evangélique du Cameroun - Douala - Décret n°74/DF/853 du 14 Octobre 1974
- Association Culturelle Islamique du Cameroun (A.C.I.C.) - Yaoundé - Décret n°88/319 du 7 Mars 1988
- Eglise Anglicane - Douala - Décret n°89/143 du 27 Janvier 1989
- Cameroon Baptist Convention (C.B.C) - Bamenda - Décret n°90/838 du 4 Mai 1990
- Mission de l’Eglise Evangélique Camerounaise - Douala - Décret n°91/159 du 11 Mars 1991
- Lutheran Church of Cameroon - Kumba - Décret n°91/257 du 30 Mai 1991
- Eglise Baptiste Nationale du Cameroun - Minyungu - Décret n°91/381 du 16 Août 1991
- Eglise Biblique de la Vie Profonde - Yaoundé - Décret n°91/484 du 3 Décembre 1991
- Association Solidaire de la Vocation Islamique du Cameroun ( A.S.S.O.V.I.C.) - Yaoundé - Décret n°92/032 du 21 Février 1992
- Eglise Universelle de Dieu - Yaoundé - Décret n°92/l 72 du 27 Août 1992
- Eglise Néo- Apostolique du Cameroun - Yaoundé - Décret n°92/225 du 30 Octobre 1992
- Eglise Jean Baptiste du Cameroun - Sangmélima - Décret n°92/226 du 30 Octobre 1992
- Union Islamique du Cameroun - Douala - Décret n°92/236 du 13 Novembre 1992
- Les Témoins de Jéhovah du Cameroun - Yaoundé - Décret n°93/043 du 3 Février 1993
- La Voie au Cameroun - Yaoundé - Décret n°93/144 du 28 Mai 1993
- Apostolic Faith Church - Bangem - Décret n°93/158 du 9 Juin 1993
- Eglise Messianique et Evangélique du Cameroun - Yaoundé - Décret n°93/l 71 du 1er Juillet 1993
- The Church of Jésus-Christ of Late Days Saints - Yaoundé - Décret n°93/238 du 9 Septembre 1993
- Mission Chrétienne du Cameroun - Nko’emvon - Décret n°93/287 du 21 Octobre 1993
- Grâce Bible Church in Cameroon - Yaoundé - Décret n°94/220 du 7 Novembre 1994
- Church of God of Prophecy - Kumba - Décret n°96/067 du 4 Avril 1996
- Native Church of the Cameroon - Ndom Bakossi - Décret n°98/047 du 27 Mars 1998
- Union des Eglises Adventistes du 7éme jour Afrique Centrale - Yaoundé - Décret n° 98/049 du 27 Mars 1998
- Union Baptiste Camerounaise - Douala - Décret n°98/050 du 27 Mars 1998
- Mission Evangélique Vie et Paix du Cameroun - Douala - Décret n°98/302 du 18 Novembre 1998
- Eglise Pentecôtiste Chrétienne du Cameroun - Yaoundé - Décret n°98/359 du 29 Décembre 1998.
- La Sainte Métropole Gréco-Orthodoxe du Cameroun - Yaoundé - Décret n° 070 du 12 février 2009
4. Point de vue biblique
Nous ne voulons pas ici porter un jugement contre l'administration de notre pays, reconnaissant qu'elle est l'autorité chargée de l'ordre social, surtout qu'elle ne s'oppose pas à la création des associations religieuses, mais la réglemente, ce qui nous semble normal sous cet aspect.
Certains avis prennent pour exemple Jésus Christ disant qu'il n'avait besoin d'aucune autorisation humaine pour prêcher et que l'autorité Romaine ne l'aurait jamais autorisé , conclusion pour ces personnes, il n'avait pas besoin d'autorisation.
Sans rien avoir contre l'administration camerounaise encore moins contre la prolifération des assemblées, nous énumérons toutefois quelques points de réflexions ci-dessous à prendre en compte :
- Jésus était soucieux de sa réputation dans son environnement ("Que disent les gens à mon sujet ?" Matthieu 16:13) ;
- Jésus évitait très souvent de scandaliser les gens (" Pour ne pas les scandaliser, va ..." Matthieu 17:27) ;
- Jésus reconnaissait le droit de l'administration Romaine (" Rendez à César ce qui est à César..." Luc 20:25) ;
- Les parents de Jésus se sont conformés au recensement orchestré par l'administration territoriale de leur époque ( Luc 2:1-5) ;
- Jésus ne demandait pas de l'argent pour prier pour les nécessiteux, ( "Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement..." Matthieu 10:8) ;
- Jésus ne vendait pas "l'eau bénite", "huile d'onction"... ;
- Jésus recevait les dons volontaires ;
- Jésus faisait des miracles et demandait très souvent de tenir le secret, aucune publicité n'était nécessaire ;
- Jésus encourageait les enfants à obéir aux parents sans surseoir à leurs responsabilités (Marc 10:7-13) ;
- Jésus étaint un prédicateur itinérant (ce qui peut justifier qu'il n'ait pas eu besoin d'autorisation puisqu'il n'avait crée aucune association) ;
- Jésus nous à recommandé d'être prudents et simples (Matthieu 10:16) ;
Nous noterons également que dans le contexte du Cameroun, la Foi chrétienne est entachée de divisions entre chrétiens par exemple :
- Aussitôt qu'un chrétien pense connaître la Parole de Dieu, il pense créer une église ;
- Beaucoup de serviteurs de Dieu au Cameroun s'autoproclament "Pasteur, Prophète, Apôtre, Docteur..." sans réelle formation et la plus part d'entre eux sont les promoteurs de leur ministère on en en arriverait à autant de serviteurs de Dieu que de dénominations. Les premiers Chrétiens avaient 12 apôtres dans le même ministère ;
- Dans certains quartiers, sur une distance de 100 mètres, on retrouve parfois 03 assemblées chrétiennes réveillées, et très souvent qui se combattent dans les prédications et se disputent les âmes ;
- Faible collaboration entre les pasteurs d'associations différentes ;
- La Parole de Dieu n'est plus la seule référence, mais plutôt on se refère aux courants religieux dominants ou venants d'autres cieux (cas d'introduction d'eau bénite, des mouchoirs oints...) ;
- Désir élévé d'indépendance de certains, et d'enrichissement pour d'autres...
D'autres part, sans pouvoir expliquer pourquoi, nous remarquons que depuis 1998, aucune autre église à caractère pentecotiste n'a vu le jour, ce qui nous amène à nous poser les questions suivantes :
- Est-ce à dire que depuis 1998, aucune église pentecotiste n'a demandé l'autorisation ?
- Pourquoi n'existe t-il pas un temps précis de réponse ? certaines sources indiquent avoir déposé des dossiers et n'avoir jamais obtenu de réponse depuis des années.
Ces questions et bien d'autres sont celles qui taraudent les esprits.
Toutefois pour pallier à la non autorisation, plusieurs associations recourent à la couverture d'une autre église autorisée. C'est pourquoi très souvent la bannière de l'association porte deux noms, en première celle de l'association autorisée et ensuite, le nom de l'association propre.
En conclusion, nous croyons que nous devons prier pour nos autorités afin que nous puissions mener une vie paisible dans notre pays mais surtout que nous devons nous conformer à la réglementation de notre administration, surtout que l'objectif global visé est non seulement d'assainir les églises "illégales", mais de lutter contre les maux qui minent la société ceci dans le cadre d’une vaste campagne d’assainissement social.
Ce que nous pouvons déplorer c'est que l'Eglise Corps de Christ au Cameroun n'ait pas pu d'elle même se mettre en ordre en sorte que ce soit des "incirconcis" qui aient à le faire ce qui est une honte pour le corps de Christ et prouve encore combien nous avons besoin d'unité et de réveil.
La rédaction de Camfaith.